Actualité dans le dépistage du cancer du poumon

27/09/2022
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Caroline Caramella 1, Mathieu Lederlin 2

1 Service de radiologie, Hôpital Marie-Lannelongue, Le Plessis-Robinson
2 Service de radiologie, Hôpital Pontchaillou, CHU Rennes

 

Après des années de frilosité, la HAS s’est positionnée en février 2022 pour le lancement de programmes pilotes de dépistage du cancer du poumon par scanner thoracique faible dose (1). Il ne s’agit pas encore d’un dépistage en population tel qu’il est organisé par exemple dans le cancer du sein, mais c’est une étape très importante.

Une efficacité démontrée mais des questions encore en suspens

La majorité des études prospectives randomisées (NLST (2), NELSON (3), MILD (4), LUSI (5)) ont montré une réduction de la mortalité spécifique chez les sujets dépistés versus ceux non dépistés. L’efficacité du dépistage par scanner peut donc désormais être considérée comme acquise. Cependant, transposer les protocoles d’essais contrôlés à une large population ne garantit pas d’obtenir les mêmes résultats. Certaines questions méthodologiques sont encore imparfaitement résolues, par exemple la définition précise de la population cible (i.e. celle pour qui le rapport bénéfice/risque du dépistage est maximal), la durée et le rythme optimal du dépistage, le problème du surdiagnostic (i.e. un nodule cancéreux qui, non traité, ne modifierait pas l’espérance de vie du patient) ou encore le rôle des logiciels d’IA dans l’aide à la détection et à la caractérisation des nodules.

Une organisation à mettre en place

Le dépistage du cancer du poumon en population soulève également d’importantes questions organisationnelles : Comment recruter les sujets à risque ? Comment s’assurer de leur adhésion au programme de dépistage ? Quelle filière de soins mettre en place ? Comment lutter contre les inégalités d’accès au dépistage ? Comment évaluer l’impact médico-économique du dépistage ? Les écueils sont nombreux et l’expérience des autres dépistages organisés (sein, colo-rectal, col utérin) sera indéniablement précieuse. L’INCa a commencé à solliciter les acteurs du dépistage du cancer du poumon (radiologues, pneumologues, chirurgiens, tabacologues, médecins de ville, centres régionaux de coordination des dépistages, représentants des patients) afin de structurer cette organisation, notamment par le biais de programmes pilotes qui répondront à des cahiers des charges précis.

Quelles implications pour les radiologues ?

Les radiologues français doivent d’abord prendre conscience de leur responsabilité dans une entreprise susceptible de sauver 5000 vies chaque année. Le diagnostic précoce reposant uniquement sur le scanner thoracique faible dose, les radiologues sont en première ligne et ont à cet égard le devoir de se former au dépistage (6). La SFR et la Société d’Imagerie Thoracique (SIT) ont mis en place un programme d’enseignement ouvert à tous les radiologues désireux de se former à l’interprétation des scanners de dépistage. Ce programme disponible sur la e-boutique de la SFR (https://eboutique.radiologie.fr) associe des cours en e-learnings et des ateliers présentiels qui permettent de s’entrainer sur de nombreux cas en conditions réelles (prise en main des logiciels de détection et volumétrie des nodules). En 2023 sera organisé pendant les JFR un examen validant cette formation et permettant de délivrer une certification au dépistage. La SIT va également diffuser très prochainement les recommandations les plus récentes en matière de réalisation et d’interprétation des scanners de dépistage. Enfin la SFR et la SIT auront aussi un rôle à jouer dans l’évaluation territoriale de l’offre de soins en imagerie thoracique, dans le contrôle qualité des examens scanographiques, ainsi que dans la promotion des projets de recherche, le plus avancé étant actuellement l’étude CASCADE qui cible les femmes fumeuses ou ex-fumeuses (7).

Tous ces points seront discutés au cours de la séance pédagogique « Dépistage du cancer du poumon, état des lieux » qui aura lieu le Dimanche 9 octobre à 16h15, salle 242.

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Figure. Coupe de scanner thoracique low dose sans injection chez un patient de 68 ans réalisé dans le cadre du dépistage (étude Prevalung). Après le bilan, le patient a été opéré, il s’agit d’un adénocarcinome de 14 mm classé pT1bN0M0. Il est depuis en surveillance simple.

Références

  1. https://www.has-sante.fr/jcms/p_3312901/fr/depistage-du-cancer-du-poumon-la-has-recommande-l-engagement-d-un-programme-pilote
  2. Aberle DR et al. Reduced lung-cancer mortality with low-dose computed tomographic screening. N Engl J Med. 2011;365:395-409
  3. de Koning HJ et al. Reduced Lung-Cancer Mortality with Volume CT Screening in a Randomized Trial. N Engl J Med. 2020; 382:503-513
  4. Pastorino U et al. Prolonged lung cancer screening reduced 10-year mortality in the MILD trial: new confirmation of lung cancer screening efficacy. Ann Oncol. 2019;30:1162-1169
  5. Becker N et al. Lung cancer mortality reduction by LDCT screening-Results from the randomized German LUSI trial. Int J Cancer. 2020;146:1503-1513
  6. Lederlin M et al. Lung cancer screening: French radiologists should prepare for it. Diagn Interv Imaging. 2021 Apr
  7. https://u-paris.fr/etude-pilote-cascade-depistage-du-cancer-du-poumon-par-scanner-faible-dose/